Déclaration de la FMTS sur la question énergétique
L’énergie présente des enjeux internationaux majeurs, notamment en termes d’accès aux droits sociaux fondamentaux, d’environnement et de tensions ou conflits géopolitiques. Face à une crise économique, sociale et écologique profonde liée aux modes de production et de consommation et aux déséquilibres Nord/Sud, il faut aller vers un modèle énergétique durable. L’accroissement de la production énergétique pour une consommation toujours plus importante, que ce soit à partir des centrales thermiques émettrices de gaz à effet de serre ou de centrales nucléaires, est contraire à cet objectif. Il faut mener une politique volontariste d’une plus grande sobriété dans l’usage de l’énergie. La FMTS appelle à une amplification des politiques des États en matière d’énergie renouvelable et d’efficacité et de sobriété énergétique.
Quelques principes généraux
1) la FMTS dénonce le refus des grandes puissances de s’engager réellement dans un processus international de réduction massive des émissions de gaz à effet de serre et soutient l’exigence d’une politique mondiale contraignante sur ce point. La sécurité des populations et la sauvegarde d’un environnement préservant la biodiversité sur l’ensemble de la planète doivent être reconnues comme droits fondamentaux.
2) La FMTS soutient l’exigence du droit à l’énergie et à l’indépendance énergétique de tout pays. Pour autant, les modes actuels de production énergétique orientés prioritairement vers l’accumulation du capital et non vers la satisfaction des besoins humains, ne sauraient constituer un modèle.
3) Le développement des énergies renouvelables doit se déployer à une échelle permettant de répondre aux exigences de réduction massive des émissions de gaz à effet de serre. Cependant, l’« économie verte » qui livre aux marchés les innovations technologiques en les orientant vers le profit ne peut aller dans le sens d’un développement soutenable. De grands programmes de recherche publique et d’expérimentation à l’échelle industrielle doivent être conduits sur l’ensemble des sources d’énergie alternatives et sur les conditions de leur exploitation dans l’intérêt général (éolien, solaire, hydraulique, marées, géothermie). De nouvelles voies doivent être ouvertes et développées (biomasse, charbon propre, nucléaire propre, …). La collaboration scientifique et technique internationale, doit viser la transparence et l’échange des connaissances, dans un esprit de solidarité planétaire et de soutien aux pays économiquement faibles et rejeter la concurrence entre les nations et la défense des intérêts privés. Un contrôle public intégrant scientifiques, juristes, syndicats et associations, en lien avec des instances internationales (UNESCO, OMS, OIT) doit présider à la mise en œuvre et au déroulement de ces programmes et à la diffusion des connaissances.
4) Des aides publiques doivent permettre de développer des programmes d’économies d’énergie (dans les transports, l’isolation des bâtiments publics et privés, les modes de chauffage alternatifs et collectifs). Le marché de l’électricité doit être régulé publiquement et les tarifs à la consommation contrôlés dans l’intérêt des populations. La FMTS se prononce contre le principe de la libre concurrence dans la production et la vente d’électricité.
5) La maîtrise de la dépense énergétique passe aussi par la maîtrise des choix de production et d’organisation du travail. L’utilité sociale des innovations technologiques, l’évolution des conditions de travail doivent être examinées en associant chercheurs, salariés, producteurs et utilisateurs. Un « droit d’ingérence » des travailleurs dans les modes et les objectifs de production permettrait de réduire la consommation énergétique et de revaloriser le travail humain en terme de conditions de travail, de santé au travail, de protection sociale solidaire fondée sur le travail, de reconnaissance des qualifications et de redistribution de la valeur ajoutée.
6) Un développement soutenable ne peut s’entendre que dans une signification sociale, économique et environnementale. Il réside dans la juste reconnaissance du travail humain dans la réponse aux besoins matériels, culturels et éducatifs de tous les peuples du monde dans le respect des écosystèmes et des ressources naturelles.
Le nucléaire
Le désastre de Fukushima ravive la question de la sûreté des installations de production d’énergie nucléaire, de la radioprotection des personnes et de l’information des citoyens. La FMTS met en avant les exigences suivantes :
– l’indépendance réelle des instances internationales et nationales chargées de la sûreté nucléaire et de la sécurité des installations ;
– l’engagement de la responsabilité des Etats dans la priorité à la sécurité face à la dérive libérale de réduction des coûts ;
– que leurs gouvernements ne puissent prendre seuls les décisions concernant la filière nucléaire, sa part dans la production énergétique de chaque pays et à terme le maintien ou la sortie de celle-ci. Seul un processus de concertation entre la société civile et ses représentants législatifs basée sur la consultation des acteurs de la filière nucléaire et de leurs organisations syndicales permettra de prendre des décisions satisfaisantes l’intérêts général et d’écarter les conflits d’intérêt ;
– une inspection complète et régulière des installations existantes dans les pays dotés d’un parc nucléaire pour évaluer la fiabilité des installations, les risques liés à leur vieillissement, aux conditions d’entretien et d’exploitation ainsi que les risques sismiques ou d’inondation ;
– L’évaluation du coût et des conditions du traitement des déchets et du démantèlement des installations ;
– Les conditions de travail et les risques pour la santé de tous les salariés du nucléaire, titulaires et sous-traitants précaires, doivent être mis en lumière. La connaissance des risques, les conditions de travail, les questions d’approvisionnement en combustible et de traitement des déchets doivent faire l’objet d’une collaboration internationale dans un esprit de solidarité planétaire de respect et de protection de tous les peuples.
Nijni-Novgorod, 12 septembre 2013